Rupture conventionnelle, mode d’emploi

La rupture conventionnelle, issue de la loi du 25 juin 2008, qui permet à l’employeur et au salarié de convenir d’un commun accord des conditions de la rupture du contrat de travail, rencontre toujours autant de succès.

Selon la DARES, sur l’année 2015, 358 380 demandes de rupture conventionnelle ont été homologuées par la DIRECCTE en 2015 et, entre le 1er janvier et le 30 avril 2016, 119 848 demandes de rupture conventionnelle homologuées sont déjà recensées.

Il ressort des textes et de la jurisprudence que certaines questions doivent tout de même se poser avant d’envisager ce mode de rupture : quels sont les salariés concernés et dans quelles conditions la rupture conventionnelle peut-elle être envisagée ?

Quels sont les salariés concernés ?

Le recours à la rupture conventionnelle est possible pour tous les salariés en contrat à durée indéterminée. Ne pourront toutefois pas être concernés, les salariés en période d’essai ou en contrat d’apprentissage ou ceux dont la rupture du contrat résulte d’un accord collectif de gestion prévisionnelle des emplois ou d’un plan de sauvegarde de l’emploi. Une rupture conventionnelle pourra tout de même intervenir dans le cadre d’une entreprise rencontrant des difficultés économiques.

Il est à noter que les salariés protégés pourront également user de ce mode de rupture sous réserve d’une autorisation de l’inspection du travail. Ainsi, le contentieux afférent à cette rupture pour ces salariés relèvera uniquement du juge administratif.

La Cour de Cassation vient de juger par un arrêt du 8 juin 2016 que la rupture conventionnelle n’est pas applicable, dans le cadre d'une mutation intergroupe à «une convention tripartite conclue entre un salarié et deux employeurs successifs ayant pour objet d’organiser, non pas la rupture, mais la poursuite du contrat de travail » (Cass. soc. 8 juin 2016 n° 15-17.555).

Une absence de vice de consentement

La décision d’opter pour une rupture conventionnelle devra s’effectuer dans un contexte exempt de tout vice de consentement de la part des parties signataires de la convention.

Ainsi, la Cour de Cassation a t elle jugé nulle une rupture conventionnelle signée dans un contexte conflictuel avec un salarié induit en erreur par son employeur qui lui promettait une indemnité au titre de sa clause de non-concurrence avant de le délier de cette dernière (Cass. soc. 9 juin 2015 n° 14-10.192).

Malgré tout, la Cour de cassation fait preuve de beaucoup de souplesse concernant son interprétation de l’absence de vice de consentement. Ainsi, l’existence d’un différend au moment de la conclusion de la convention n’a aucune influence sur la validité de la convention même s’il résulte de reproches professionnels ayant fait l’objet de sanctions disciplinaires (Cass soc 19 novembre 2014 n°13-21973). De même a-t-elle jugé que l’état de santé d’un salarié n’altère pas son consentement même s’il est en arrêt de travail pour une dépression attribuée à ses conditions de travail (Cass. soc. 30 septembre 2013).

La charge de la preuve incombe à la partie qui prétend que son consentement a été vicié.

Selon les juges, une rupture conventionnelle peut même être signée durant une période de suspension du contrat de travail à la suite d’un accident du travail ou une maladie professionnelle dès lors qu’il n’existe aucune fraude de la part de l’employeur et qu’il n’existe pas de vices du consentement (Cassation 30 septembre 2014 n°13-16297).

Comment se déroule la procédure ?

Avant toute rupture conventionnelle, les parties doivent se rencontrer dans le cadre d’un entretien préalable de négociation. Cet entretien n’est entouré par aucun formalisme spécifique ; cependant, au cours de celui-ci, chaque partie a le droit d’être assistée sous réserve d’en informer préalablement l’autre partie.

Il est à préciser que contrairement à la procédure disciplinaire, l’employeur n’a aucune obligation d’informer le salarié de cette possibilité (Cass soc 19 novembre 2014).

A l’issue du ou des entretiens, une convention de rupture devra être signée par les parties. Les juges admettent que cette convention puisse être signée immédiatement après l’entretien.

La signature de la convention va ouvrir un délai de rétractation de 15 jours calendaires durant lesquels chacune des parties pourra se rétracter par un courrier attestant de sa date de réception par l’autre partie sans avoir à se motiver. Une fois le délai expiré, les parties ne pourront plus se rétracter.

A l’issue de ces quinze jours et à réception de la convention, un nouveau délai de quinze jours s’écoulera durant lequel la convention sera homologuée par la DIRECCTE.

Cette homologation, par accord explicite ou par absence de réponse de la DIRECCTE, aura pour objectif de s’assurer de l’absence de vice de consentement.

La Cour de Cassation est très souple à l’égard des conventions homologuées comprenant des irrégularités de procédure.

Ainsi, elle a jugé que l’erreur dans le calcul du délai de rétractation n’entraîne pas l’annulation de la convention dès lors qu’elle n’a pas eu pour effet d’altérer le consentement des parties ou de les priver de la possibilité d’exercer leur droit à rétractation (Cass.soc. 29 janvier 2014 n° 12-24.539).

Cependant, par une décision du 14 janvier 2016, elle considère qu’une demande d’homologation ne peut pas intervenir avant la fin du délai de rétractation  qui constitue une formalité substantielle devant impérativement être respectée et dont la violation entraîne un refus d’homologation de la convention de rupture (Cass soc 14 janvier 2016 n°14-26220).

Il est envisageable d’accompagner la rupture conventionnelle d’une transaction dès lors que la conclusion de la transaction est postérieure à l’homologation de la convention (Cass. soc. 26 juin 2013). Cette transaction devra avoir pour objectif de régler «un différend relatif non pas à la rupture du contrat mais à son exécution sur des éléments non compris dans la convention de rupture » (Cass. soc. 26 mars 2014).

A l’exception des ruptures conventionnelles soumises à l’autorisation de l’inspecteur du travail et relevant du juge administratif, tout litige concernant la convention de rupture conventionnelle relève de la compétence du Conseil des prud’hommes. Le recours juridictionnel devra être formé, à peine d’irrecevabilité, avant l’expiration d’un délai de douze mois à compter de la date d’homologation de la convention.

Effectivité de la rupture du contrat de travail et ses conséquences

La rupture du contrat de travail est effective à la date fixée par la convention qui doit obligatoirement se situer après la date limite pour l’homologation de la convention. Elle ouvre droit au versement du solde de tout compte du salarié ainsi qu’au bénéfice de l’assurance chômage. Elle permet également l’octroi d’une indemnité de rupture égale à l’indemnité légale de licenciement ou à l’indemnité conventionnelle si celle-ci est plus avantageuse. Cette indemnité sera soumise au régime fiscal de l’indemnité de licenciement sauf si le salarié peut prétendre à une pension de retraite de base d’un régime légalement obligatoire, à taux plein ou non.

 

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