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Mesure d’interdiction de gérer : rappel du contenu de la motivation

Affaires - Commercial
Civil - Responsabilité
28/10/2019
Toute décision d’interdiction de gérer prononcée par une juridiction doit être motivée tant sur le principe de la sanction, que sur son quantum, au regard de la gravité des fautes et de la situation personnelle de l'intéressé.
Le gérant de plusieurs SARL placées en liquidation judiciaire a vu sa responsabilité de dirigeant engagée pour insuffisance d’actif, par le liquidateur désigné par le tribunal.

La cour d’appel a prononcé en application de l’article L. 653-8 du Code de commerce, une mesure d’interdiction de gérer d’une durée de sept ans, décision contestée par le gérant devant la Haute juridiction.

Or il est de principe que, « dans les cas prévus aux articles L. 653-3 à L. 653-6, le tribunal peut prononcer, à la place de la faillite personnelle, l'interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement, soit toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole et toute personne morale, soit une ou plusieurs de celles-ci » (C. com, art. L. 653-8).

La mesure d’interdiction de gérer revêtant le caractère de sanction (Cass. com., 1er déc. 2009, n° 08-17.187 ; Cons. const. QPC, 29 sept. 2016, n° 2016-570 et n° 2016-573), la Cour de cassation exige que le tribunal « motive sa décision, tant sur le principe que sur le quantum de la sanction, au regard de la gravité des fautes et de la situation personnelle de l'intéressé » (v. déjà en ce sens, Cass. com., 5 juill. 2018 n° 18-11.743 ; Cass. com., 17 avr. 2019, n° 18-11.685).

Cette obligation résulte des dispositions de l’article R. 662-1 du Code de commerce qui soumet les matières régies par le livre VI de la partie législative du même code relatif aux « Difficultés des entreprises », aux règles du Code de procédure civile, dont l’article 455 dispose que « Le jugement doit être motivé ». C’est d’ailleurs au double visa de l’article L. 653-8 du Code de commerce, ensemble article 455 du Code de procédure civile, qu’a été rendue la décision.

En l’espèce, si les juges du fonds ont explicité les fautes reprochées au gérant (notamment avoir payé ou fait payer, après cessation des paiements et en connaissance de cause de celle-ci, un créancier au préjudice des autres créanciers ; avoir, en s'abstenant volontairement de coopérer avec les organes de la procédure, fait obstacle à son bon déroulement ; fait preuve d’une mauvaise fois caractérisée, etc.), ils se sont simplement borner à relever leur gravité et leur conséquence pour décider de la peine, sans motiver suffisamment leur décision. La Cour de cassation censure donc cet arrêt et renvoie l’affaire afin qu’il soit statué conformément aux critères de motivation dégagés par la jurisprudence.

Pour davantage de développements sur les sanctions professionnelles applicables aux dirigeants de sociétés en matière d'interdiction de gérer, voir le Lamy Droit Commercial, édition 2019, n° 4680 et s.
Source : Actualités du droit