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De l’indemnisation par l’ONIAM dans le cas où une infection nosocomiale a entraîné la perte d'une chance d'éviter des préjudices

Public - Santé
25/02/2020

► L'article L. 1142-1-1 du Code de la santé publique, qui n'a pas pour objet de définir les conditions dans lesquelles il est procédé à l'indemnisation du préjudice, mais de prévoir que les dommages résultant d'infections nosocomiales ayant entraîné une invalidité permanente d'un taux supérieur à 25 % ou le décès du patient peuvent être indemnisés au titre de la solidarité nationale, trouve également à s'appliquer dans le cas où une infection nosocomiale a entraîné la perte d'une chance d'éviter de tels préjudices ;

pour l'application de cet article dans l'hypothèse où une infection nosocomiale est à l'origine d'un préjudice constitué d'une perte de chance, le préjudice est indemnisé au titre de la solidarité nationale lorsque le taux d'atteinte permanente à l'intégrité du patient, calculé par la différence entre, d'une part, la capacité que l'intéressé aurait eu une très grande probabilité de récupérer grâce à l'intervention en l'absence de cette infection et, d'autre part, la capacité constatée après consolidation du préjudice résultant de l'infection, est supérieur à 25 %.

Telle est la solution retenue par le Conseil d’Etat dans un arrêt rendu le 12 février 2020 (CE 5° et 6° ch.-r., 12 février 2020, n° 422754, mentionné dans les tables du recueil Lebon).

Dans cette affaire, une patiente a été victime d’un accident vasculaire cérébral lié à un cavernome, le 14 février 2007. Une intervention chirurgicale était programmée le 20 février 2007, mais au cours de son hospitalisation, la patiente a été infecté par le staphylocoque doré et l’opération a donc été reprogrammée le 28 février 2007. Estimant que cette infection bactérienne était de nature nosocomiale et que, ayant diminué les chances de succès de l'opération chirurgicale, elle était à l'origine des séquelles dont elle demeure atteinte, la patiente a saisi la commission régionale de conciliation et d’indemnisation, qui a émis un avis favorable à son indemnisation au titre de la solidarité nationale. L’ONIAM a toutefois refusé, le 4 octobre 2012, de lui adresser une offre d’indemnisation.

La cour administrative d’appel a condamné l’ONIAM à verser une somme à la patiente. Un pourvoi en cassation a donc été formé par l’Office (CAA Marseille, 31 mai 2018, n° 16MA03550).

Enonçant la solution précitée, le Conseil d’Etat rejette le pourvoi. En estimant que l’opération chirurgicale pratiquée sur la patiente permet généralement une amélioration partielle ou totale de l'état de santé des patients ayant connu le même type d'accident ischémique, la cour a porté sur les pièces du dossier une appréciation souveraine, exempte de dénaturation. Elle a pu, sans erreur de droit, en déduire que, même s'il n'était pas certain que l'intervention chirurgicale aurait, en l'absence d'infection nosocomiale, amélioré davantage l'état de santé de la patiente, cette infection avait néanmoins fait perdre à l'intéressée une chance d'amélioration de cet état de santé (cf. l’Ouvrage « Droit médical », Les infections nosocomiales).

 

Laïla Bedja

Source : Actualités du droit